Tous deux étaient sur le seuil de sa porte, qu’elle n’avait pas encore ouverte. Ils se tenaient contre, elle enserrée de ses colossaux bras qui émergeaient d’un marcel blanc douteux et presqu’entièrement dissimulée par son immense corps musculeux qu’il était obligé de fléchir et de gauchir afin que leurs lèvres puissent se joindre sans qu’il ait eu à la soulever du sol. C’est à peine si on la voyait entre son buste et le battant contre lequel il l’écrasait, et si je l’ai reconnue, c’est grâce au regard qui s’est soudainement ouvert, juste dans l’angle du cou et de l’épaule gauche du monstrueux rustre, au moment où, un peu méfiant, je passais derrière eux.

Ce regard s’est aussitôt posé sur moi, et je n’y ai lu ni détresse ni crainte, mais seulement de l’étonnement – celui de me voir encore dans l’immeuble – et de la satisfaction – probablement celle d’avoir entre les dents une grosse et longue langue qui sans nul doute devait elle aussi, à l’instar de tous les autres muscles de ce corps édifiant, subir de multiples exercices. Et à la vue de ce regard, je n’ai pu m’empêcher de m’arrêter et de le soutenir ; et ainsi nous sommes restés, un long moment, à nous regarder ; ainsi jusqu’à ce que de derrière la masse qui l’étreignait soit sortie une main, une main munie d’une clef qu’au jugé – puisqu’elle me regardait toujours, puisqu’elle l’embrassait toujours – elle a glissée dans la serrure, puis tournée, puis lâchée pour agripper la poignée que d’une brusque secousse elle a baissée...