« Les Yapous, lointains descendants de la nation japonaise qui réveilla autrefois
les peuples colonisés de l’Asie et fut la cause de leur émancipation du joug
des puissances européennes […]. »
Voilà qui est étonnant. Ce n’est pas l’auteur qui s’exprime (!), mais L. Brooks dans La mission universelle des Yapous dont Numa (le narrateur) cite un extrait. Le réveil des peuples colonisés asiatiques et l’émancipation du joug de l’Occident étaient le prétexte que le Japon, dans les années trente, s’était donné pour envahir et écraser l’Extrême-Orient, en particulier la Chine (voir L’armée de l’empereur de Margolin). Personne n’y a cru, pas même eux. Brooks, et donc Numa, le pose comme une vérité, se placent donc du côté de l’armée japonaise. Il y a là un paradoxe d’autant que l’auteur n’a de cesse, et c’est le propos même de son gigantesque texte – si l’on excepte l’argument « sadomaso » –, de réduire à néant l’essence du peuple japonais et tout ce qu’il véhicule. On pourrait dire que Brooks commet une erreur historique (volontaire ou non), mais le plus étrange est que le narrateur ne la relève pas. (Y aurait-il cru ?)