Le Portrait du Monde,
c'est le portrait du journal, le portrait de la presse, portrait
du progrès, du plomb, du travail, de l'homme, et enfin, faut-il
l'ajouter, du monde tout entier. Contre toute attente, c'est
passionnant... Au départ, une enquête, puis Le
Monde, à la veille de son déménagement et de ce qu'il va
impliquer dans sa vie, a demandé à Noël une
uvre littéraire plutôt qu'une enquête proprement dite.
C'est ce qu'il a fait ; et l'a sous-titrée : « roman ». En est-ce un ? Je pense que oui...
Mais comme une enquête, il fait beaucoup parler : les gens
qui y travaillent, les gens qu'il rencontre. Mais pas de visage,
pas d'identité : rien que des paroles, des voix, des
opinions noyées dans la masse du texte...
p. 84 : une page de trop. Oui, pourquoi cette page qui le fait verser dans une sorte d'intellectualisme essoufflé ?
p. 116 et suivantes : la
révolution. Extrême justesse, propos d'une voix du Monde.
Extrait : « Voyez comme les révolutions sont le
contraire du progrès. Nous vivons une révolution technique,
d'où le désordre social du chômage parce que, paradoxalement,
les maîtres de cette métamorphose sont des révolutionnaires ne
pensant que compétition et profit, alors que s'ils étaient des
gens de progrès, ils sauraient qu'on n'avance pas en excluant
les hommes. Le vocabulaire est si bien conditionné qu'il
n'intègre pas l'idée qu'une révolution peut être
réactionnaire en soi. »
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