Elle :
« Elle disait vrai : elle m’aimait autant que ses deux filles, des jumelles âgées de dix ans qu’elle n’appelait jamais par leurs prénoms puisqu’elle ne les dissociait pas l’une de l’autre. Elle les nommait toujours futago et j’ai longtemps cru que ce mot duel était le prénom d’un seul enfant, les marques du pluriel étant souvent vagues en langue nippone. Un jour, les fillettes vinrent à la maison et Nishio-san les héla de loin : “ Futago ! ” Elles accoururent comme des siamoises, me révélant par le fait même le sens de ce mot. La gémellité doit être au Japon un problème plus grave qu’ailleurs. »
Lui :
« Sucre-en-Poudre comptait soixante ans et en
paraissait vingt-cinq. Son régime consistait à ne boire que du champagne et à ne
jamais se coucher, sauf avec des jockeys ou des professeurs de danse. Elle
tenait une fumerie d’opium. On y endossait des robes japonaises en crêpe de
Chine. On fumait, pêle-mêle, sur une descente de lit. On écoutait feu Caruso
chanter Paillasse. »