Que j'aime Conrad reste pour moi
un complet mystère. Il y a la langue, bien sûr. Aussi ce style,
et la démarche qui y est attachée, c'est-à-dire le parti pris de l'
« anglais-latin », celui proche du français.
Mais encore... La mer ? les rapports de ces bouts du monde
emplis de tempêtes et de figures déchirées, ou inflexibles, ou
tourmentées ? (à l'image de Faulkner ?) Je ne sais pas.
Mais je sais aussi que je suis attaché d'une
manière dont je me défends parfois et que je ne m'explique
guère à Mac Orlan, ou à Loti, Cendrars, tous
trois pouvant être rangés sous le titre d' « aventuriers », les trois premiers, Conrad
inclus, ayant la mer pour point commun. Pourtant, je ne me sens
pas d'attirance particulière pour la mer (mais il suffit que
je réfléchisse un peu pour m'apercevoir que bon nombre de mes
textes les plus importants, en tout cas
ont tout de même la mer pour décor, ou comme élément : SdeF,
La Tache, William et les songes,
La Barge, Léa, La petite Anglaise, etc. Ou plutôt que la
mer, est-ce la côte, ou le port, ou la plage, ou encore la
limite, le seuil entre deux mondes ?)
5 mars 1996