Je l’ai comme une saucisse trop cuite, rouge, irritée, avec la peau qui se rétracte à peine ; ce n’est pas avec ça que je vais faire des conquêtes. En écrivant cela, je pense à Therapy que je poursuis, long épisode ce matin où le narrateur raconte l’histoire de son premier amour, à l’adolescence, à l’aube des années cinquante, une jeune fille issue du milieu catholique irlandais, pratiquante, presque pieuse, des difficultés que cela a entraînées et de l’échec qui en a résulté. C’est évidemment le type de récit propre à remuer immanquablement les sentiments et la mémoire de tout un chacun, moi en l’occurrence. J’ai pensé à Marie-Céleste, à ce qui ne s’était pas fait, à ce que j’avais peut-être manqué, avec elle et avec d’autres, puis à tout ce que j’avais manqué et manque encore (sans regret ni désillusion, et c'est peut-être pire), pensé à mon âge et au regard que j’avais porté toute la soirée d’hier sur Ophélie en ayant à l’esprit je ne sais quelle aventure avec elle tout en y croyant pas un instant (et n’oublions pas la saucisse tuméfiée), en ne le souhaitant même pas, l’imaginant simplement et en m’en réjouissant (en jouissant ?) car je suis bien obligé de constater que c’est l’imagination seule qui me plaît. Il n’empêche que je la regarde, la scrute, la contemple presque, me surprends à me rapprocher d’elle, à chercher des prétextes pour simplement la toucher, ne serait-ce que du bout du doigt comme je l’ai fait à plusieurs reprises, sous je ne sais plus quel prétexte.

 

18 janvier 2009