C'était chez Valérie
où je vois inscrit sur l'une des tranches le nom de
Châteaubriand. Je n'ai jamais lu Châteaubriand, je l'ai pris.
Il s'agit de La Brière, 1923, Grasset, 1re année d'édition.
Mais je ne sais pourquoi, peut-être le titre, ou l'illustration
qui figure sur la couverture, quelque chose me faisait tiquer, et
une fois rentré, je l'ai mieux regardé. Et en effet, s'il
s'agit bien de Châteaubriand, ce n'est pas celui que l'on
connaît, prénommé François-René, mais un autre, prénommé
lui, Alphonse...
Renseignement pris, celui-ci est un obscur lauréat du Goncourt
dans les années 10 ; j'ai aussitôt décidé de ne pas le
lire, d'autant que ça sentait fort la chronique paysanne... Et
puis, je l'ai oublié, et puis, comme je n'achète plus de livres
et qu'il faut bien que j'épuise mon stock, je l'ai tiré des
rayonnages, pensant bien ne plus l'y remettre et m'en
débarrasser au plus vite...
Ce que je ne ferai pas, car, contre toute attente, c'est prenant,
et intéressant. C'est effectivement une chronique paysanne
et plus précisément locale, la Brière étant une petite
région de marécages près de St Nazaire , mais dont le
style, le ton, l'histoire sont bien au-delà du médiocre que je
craignais. C'est vif, riche et presque élégant ; de cette
élégance un peu « rude » qui caractérise La
Varende avec lequel ce Châteaubriand-là me semble avoir
quelques affinités... Bref, je suis proprement emballé...
28 mars 1991 (dans une lettre à B***)