Je ne l’avais pas vue depuis deux mois et craignais déjà le trouble et le malaise. Je l’ai trouvée changée, physiquement, peut-être sa coiffure, ou un air reposé, et jolie, beaucoup plus jolie, et de lui découvrir cette neuve joliesse n’a fait qu’accentuer la tension qui m’a saisi dès que je me suis assis. J’étais déjà sur les nerfs suite à mes déboires avec Olivette ; mais c’était de me retrouver avec elle qui m’agitait, j’ai eu beaucoup de mal à la regarder tout en lui parlant. J’ai réussi à me montrer léger et naturel, suis même allé jusqu’à m’asseoir à son piano pour lui jouer Amandine (je peine dessus, nous en avions déjà parlé). Je me suis embrouillé, ai cafouillé, mais avec suffisamment d’humour pour que ça m’ait aidé à gommer en partie la tension qui me gagnait de plus en plus. Je ne sais qu’en penser, comme je ne sais que penser de son comportement alternativement ouvert et relâché, puis tout à coup froid et clos. Mon comportement se conforme exactement au sien… Je lui ai demandé des renseignements au sujet des cours de piano et des revenus que l’on peut en tirer ; ça a été l’occasion de la mettre au courant de ma situation de « célibataire », de mes problèmes d’argent, de mon idée de donner des cours comme appoint, puis de mon retour imminent en ville. Comme un imbécile, je m’étais attendu à ce qu’elle me pose des questions, elle n’en a rien fait (et pourquoi l’aurait-elle fait ?)...