Mais là n’est pas la question. J’écris une partition pour qu’un autre l’interprète. Je n’y mets pas d’indications : la partition, ce ne sont que des signes particuliers à la musique et reproductibles qu’en termes de musique : le reste n’est qu’agrémentation, qu’une manière de fioriture ou de sophistication. Je la transmets à l’interprète. À ce moment-là, il peut la prendre, la lire, l’entendre. Puis me la rendre en me disant, comme signe d’acceptation ou non : « C’est entendu. » Et partir. Mais il me dira plus sûrement : « Comment voulez-vous que je l’entende ? » ou alors : « Comment voulez-vous l’entendre ? » Je lui dirai alors : « Je n’ai pas besoin de l’entendre, je l’entends déjà. Au mieux, je voudrais l’écouter. » Et il dira : « Mais moi, comment dois-je l’entendre ? » Je lui dirai : « Vous l’avez déjà entendue. À vous de voir, si vous voulez l’écouter. Et me la faire écouter. Si vous voulez cela, l’écouter et me la faire entendre, jouez-la. » « Oui, mais comment ? » « Comme vous voudriez que cela soit écouté... » De ce papier, il tirera des sons. Ce seront ses sons. Les siens. Ou du moins, c’est ce que je voudrais : qu’ils soient siens. Il ne l’acceptera pas, ne comprendra pas...