J’ai repris L’amour après l’avoir débarrassé en partie, à l’aide d’une gomme, de la poussière dont son dos était incrusté (débarrasser le dos de l’amour de sa poussière) . Étal d’un brocanteur à Rocke, l’un des premiers, une petite vingtaine de livres dont la majorité était justement « incrustée » de cette poussière jusqu’à rendre le dos de certains proche de l’illisible. Dont celui-ci. J’avais hésité, l’avais finalement emporté avec Détruire dit-elle dans un meilleur état. La tranche de même était noire de cette même poussière (de la souplesse maligne de la langue : si j’avais écrit « était noire de poussière », je serais tombé dans la répétition que la langue française n’admet pas – à la différence de l’anglais où, curieusement, elle passe très bien). J’ai gommé le tout hier, sans grand succès. Mais il est de bonne tenue et parfaitement lisible. Alors, je le lis. J’avais commencé à la terrasse du café rouge, je l’ai repris ce matin. Je me traîne un peu. Auto-caricature, c’est de ce Duras dont les abjects se gaussent. Je ne m’en gausse pas, mais j'avoue que c’est un peu pénible. J’y retourne malgré tout… (Comme marque-pages, l’emballage d’une tablette de chocolat où est inscrit, doré sur vert : « Au plaisir de vous revoir ».)
16 mai 2006