Ferry. Je suis arrivé avec une demi-heure d’avance (il est étrange que je mette toujours un bon trois heures pour faire Douvres Acton et deux heures et demi pour le retour alors que je prends exactement la même route, et le ralentissement à Dartford à l’aller n’explique pas tout – le tunnel, alors que pour le pont au retour il n’y a pas de problème : pourquoi n’ont-ils pas fait deux ponts ? – mais il est possible qu’au départ il n’y ait eu que le tunnel devenu insuffisant au bout d’un temps). Dix voitures, quelques camions, un bus, et la totalité des bars, restaurants, boutiques sont fermés, c'est presque désert. Des personnes portent des masques, les enfants, quelques ados cavalent en riant. Je viens de remplir ma déclaration sur l’honneur qui sera exigée si je suis arrêté (en lieu et place de l’attestation officielle qui ne spécifie pas le retour de l’étranger). J’avais l’intention de boire un café, tant pis… Je suis parti très énervé, d’autant qu’Éléonore avait rempli la voiture pratiquement jusqu’au toit. Je viens de lui envoyer un message pour l’informer que j’étais à Douvres. « Love you », m’a-t-elle répondu. « Me too. »… Dernière étape, rentrer (directement à Tourbe ; après hésitations, je ne m’arrête pas à Mola), puis décharger la voiture, ça va me prendre un moment. Je suis curieux de voir à quoi ressemblent les rues (j’ai des visions de flics à tous les coins de rue). Je suis étonné qu’il y ait tant de voitures anglaises, et les autres sont européennes. Fermetures des frontières ? (Mais on ne peut empêcher les gens de rentrer chez eux – oui, mais et les Anglais ? Mais ils ne s’arrêtent peut-être pas en France.) Nous voilà partis. Je ne serai pas à la maison avant trois heures. J’ai repris Bukowski qui m’agace un peu. « Dedicated to bad writing », exergue. Je ne sais si c’est mauvais ou non, mais ça m’ennuie (je ne suis pas non plus dans le meilleur état pour lire)… Je me demande quel sens ont les attestations ; on peut écrire n’importe quoi et finalement circuler comme bon nous semble (non, pas vraiment ; en voiture, peut-être, mais pas à pied). Je vais fumer (sixième du jour). Je n’ai toujours pas compris en quoi consiste le contrôle de la voiture avant le passage au guichet pour l’enregistrement. On coupe le moteur, ils sont deux, l’un reste près de la voiture, tandis que l’autre effectue un contrôle en tournant autour. Cela doit être la troisième ou quatrième fois que cela m’arrive. Ça dure à peine une minute. Cette fois, celui qui était près de la voiture m’a demandé l’âge qu’elle avait ; « fifty three », ai-je dit, puis, après avoir réfléchi : « eighty-seven » pour l’année, « so, yes, fifty three ». « Fifty three », a-t-il dit, « it’s a lovely car ». C’est en sortant du garage que je me suis rendu compte que j’avais dit fifty three et non thirty three, c’est incroyable…
19 mars 2020