JOURNALS

ou

La Vie à Billy

représentation scénique

pour 33 instruments et deux récitants

Guy GRUDZIEN

(extrait)

 

Poser la question de l'écriture ; de l'art et de l'écriture.
Contre la fuite du temps et du vide de l'écrit (de l'esprit), s'imposer la pratique du journal. L'entamer, s'y tenir, s'y accrocher, en étant dans l'ignorance encore qu'il en naîtra d'autres, comme des frères, des petits cousins en vue de l'élaboration d'une famille.
Se poser la question de la maîtrise, du contrôle ; en définitive, du dressage, de la domination : chercher à dresser le temps ; le dresser comme on dresse une liste, soit : le mettre debout, mais aussi l'apprivoiser, jusqu'à l'incarcérer. L'immobiliser. Le mettre hors d'état de nuire : le journal est dès lors la mise en œuvre de l'apprivoisement du temps, jusqu'à sa soumission complète, sa reddition sans conditions.
Refuser le journal comme mise à plat de l'intimité, comme démêlage des complexités des moi-s (mois). Ce qui est écrit doit être vu, su, lu, connu, entendu. Divulgué, révélé. Le journal non pour s'épancher, se confier, se confesser, se défouler, se libérer, s'alléger, mais pour plaire, pour exprimer, pour rendre compte. En définitive, pour donner, et ainsi être meilleur, et ainsi rendre meilleur.
Non pas pour se faire connaître, mais pour faire connaître...